Eddy Merckx, on le sait, est un ardent partisan du doublé Giro-Tour qu’il a réussi à trois reprises (1970-72-74). Le dernier fut Pantani en 1988. « C’est la meilleure préparation pour le Tour. On a une discipline de vie, on est massé chaque jour et on évite de manger n’importe quoi ! », dit-il. C’est ce que peut réussir cette année Alberto Contador, bien plus à l’aise, semble-t-il, que son grand rival Andy Schleck, quasiment invisible depuis le début de la saison et qui traîne dans son sillage un faisceau d’interrogations.
Andy a-t-il raté sa préparation ou le meilleur est-il à venir ? Nerveux comme beaucoup depuis le départ de Vendée, il se plaint du parcours : la preuve qu’il n’est pas bien dans sa tête et qu’il redoute le moindre incident qui pourrait le reléguer. Comme Contador. Est-il tout simplement à la hauteur de ses ambitions cette année ? ...
Faiblesse passagère et simple avertissement ou fissure plus profonde qui pourrait engager l’avenir ? Il reste quelques jours au cadet des Schleck pour s’améliorer avant la première arrivée en altitude, à Luz/Ardiden, avec au programme la Hourquette d’Ancizan (col inédit) et le Tourmalet. C’est là qu’il a rendez-vous avec son destin et l’on sait que l’entrée dans la haute montagne est toujours déterminante. Une journée à ne pas se rater car l’addition pourrait être salée, d’autant plus que Contador est obligé d’attaquer pour espérer effacer une partie de son retard. Et il est certain qu’il ne commettra pas la même boulette que le Luxembourgeois l’an passé dans la montée sur Avoriaz lorsque celui-ci avait attendu le dernier kilomètre pour distancer l’Espagnol, en panne de jambes ce jour-là !
Malgré l’avance d’Andy au général (1’38) l’avantage semble bien être à Contador qui sort d’un Giro excessivement montagneux et de trois semaines de haute compétition. L’Espagnol y a évolué à sa guise alors qu’Andy suivait tout ça de loin. Deux façons différentes de gérer sa saison et d’aborder le Tour, désormais. Le temps de récupérer et de remettre la machine en route, Contador est parti pour une course par handicap. Mais il est déjà dans le coup, au contraire d’Andy : il l’a prouvé dans le Mur de Bretagne, même si ce n’était qu’une bosse de 2,5 km.
Visiblement Andy Schleck et son entourage ont tout misé sur la troisième semaine, avec le risque de se fourvoyer. On peut le redouter, en effet, car on l’a peu vu depuis la reprise : Liège-Bastogne-Liège, Amstel, Tour de Suisse et championnat national. C’est peu. Et jamais à son avantage sur le terrain. En juin, sa participation au Tour de Suisse a été très laborieuse et son comportement bizarre. Animateur d’une longue échappée via les cols du Grimsel et de la Grande Scheidegg, il s’est effacé sur le haut pour son équipier Fuglsang, finalement battu à Grindelwald par Sagan et Cunego. Puis dans la difficile ascension vers Malbun (Liechtenstein), il est resté collé à la route, accusant un gros retard à l’arrivée sur son terrain favori. Le lendemain il a refait surface vers la station autrichienne de Serfaus mais sans pouvoir revenir sur le belge Thomas de Gendt, dernier rescapé d’une longue échappée. Et cela malgré huit kilomètres d’ascension !
Désormais c’est une lutte contre le temps pour le leader des Leopard-Trek , qui peut compter, certes, sur une garde rapprochée impressionnante pour l’emmener au pied des Pyrénées. Mais sans garantie de réussite, car la montagne impose un effort personnel auquel nul ne peut se soustraire. Même quand on est en avance au classement.
Bertrand Duboux
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