Le Belge Johann Van Summeren (Garmin - Cervelo) a remporté, ce dimanche, la 109ème édition de Paris-Roubaix. Il devance de 18 secondes Fabian Cancellara et Marteen Tjallinghi. Lars Bak est quatrième.
Une classique, fut-elle aussi huppée et difficile que Paris-Roubaix, n’accorde pas toujours ses faveurs aux favoris. L’histoire du cyclisme regorge d’exemples où le vainqueur d’un championnat du monde n’est pas obligatoirement le meilleur coureur. Paris-Roubaix n’échappe pas à cette règle non écrite. Ces dernières années, nous avons assisté à la victoire de Dirk De Mol et à celle de Servais Knaven dont on ne peut dire qu’ils possédaient le plus beau palmarès du peloton.
Il en est de même cette année avec la victoire inattendue du belge Johann Van Summeren (Garmin-Cervelo). Ce coureur est âgé de trente ans. Dans la catégorie espoirs, il a obtenu des succès significatifs, tel Liège-Bastogne-Liège. Passé professionnel en 2004, il a toujours été considéré comme un équipier aidant ses leaders successifs à accumuler des victoires. Son sort lui convient. Il n’a jamais un mot plus haut que l’autre et s’acquitte de sa tâche avec une grande générosité. En un mot, il est apprécié par ses leaders. Il n’a pas beaucoup gagné de courses (Paris-Roubaix est la 7ème victoire acquise en 8 ans de professionnalisme), mais il préfère se dévouer pour les autres.
Cependant, en allant prendre le départ de Paris-Roubaix, une idée lui traversa l’esprit. Et s’il gagnait ? Pourquoi pas lui, après tout. Sa formation Garmin-Cervelo était sur le papier l’une des plus fortes. Les grands favoris, Boonen, Cancellara, Hushvod Pozzato, Ballan allaient peut-être pratiquer un marquage strict dont quelques-uns, dont lui - sans pour autant trahir l’esprit d’équipe qui l’anime - avaient une chance de tirer partie. Et puis le temps était merveilleusement beau. Le ciel était bleu, les sentes pavées sèches. Il n’y avait pas de flaques d’eau noirâtre cachant un piège à chutes. Il n’y avait pas d’humidité. Parfois, même l’herbe sauvage commençait à pousser entre les pavés donnant ainsi l’impression de rouler sur une bande dénuée de traquenards. Le parcours était ainsi moins dur que les années de pluie, de grêle et de froidure.
Van Summeren, qui n’a pas les yeux dans sa poche, avait bien remarqué dès le départ et à l’approche des premiers secteurs pavés que les grands favoris laissaient Cancellara mener la course en refusant par exemple de le relayer dans les secteurs stratégiques avec, sans aucun doute, le secret espoir de pouvoir lui porter le coup de grâce un peu plus tard. C’est la raison pour laquelle notre belge, lorsque le français Guesdon porte au pire des difficultés de la tranchée d’Arenberg une violente attaque, fut aussitôt dans sa roue et assuma ensuite sa part de travail.
Les événements ensuite confortèrent Van Summeren dans son idée de remporter l’épreuve. Hushovd, son chef de file, ne lâchait pas d’un centimètre la roue de Cancellara; la formation Quick Step fut vite décapitée (incident mécanique pour Boonen dans Wallers-Arenberg sans pouvoir être dépanné tout de suite, puis chute le contraignant à l’abandon, crevaison, puis deux chutes pour Chavanel le rejetant loin de la tête de la course). Mésentente flagrante entre Flecha et certains membres de la formation Rabobank, chutes et crevaisons diverses, toujours au mauvais moment pour Pozzato, Leukemans et bien d’autres encore. Le summum fut atteint lorsque sur un énième contre-attaque de Cancellara suivi comme son ombre par Hushovd et Ballan, le suisse se relèvea car ses deux accompagnateurs avaient décidé de lui laisser le soin de régler l’allure pour mieux ensuite lui régler son compte. Discussions entre coureurs, entre directeurs sportifs. Cancellara restait sur sa position. Il « enterra » avec lui le Norvégien et l’Italien et alla quérir, seul, une belle deuxième place.
Finalement, Van Summeren, conseillé par Peter Van Petegem, un ancien vainqueur de l’épreuve, se dégaga comme Merckx jadis, où plus récemment Marc Madiot, dans le secteur du Carrefour de l’Arbre, à 14 km de l’arrivée et reçu au vélodrome de Roubaix, une si gigantesque ovation qu’il a préfèré bâcler l’interview à la télévision pour mieux apprécier ce qui est à ce jour le plus merveilleux, le plus prodigieux et le plus paradisiaque de sa déjà longue carrière. le L’avenir nous dira si cette édition de Paris-Roubaix est à inscrire parmi les plus belles. A mon avis, non. Mais elle est à mettre au chapitre des éditions où les équipiers décident avec bonheur de jouer les leaders grâce à leurs qualités physiques et à leur détermination. C’est en tout cas une belle histoire pour les veillées futures au coin du feu et dans les réunions où, jusqu’à pas d’heure, on fait et refait le monde cycliste. D’autant plus que sur la pelouse, en tenue de coureur, couvert de poussière, il a demandé et obtenu la main de sa fiancée. « Certains, a-t-il dit, offrent une bague dans un telle circonstance. Moi j’offre un pavé ».
Jean-Paul
Un pavé !? On sait que l'enfer est pavé de bonnes intentions : donc, ensuite, le mariage, et la boucle est bouclée ! Moralité, rien ne vaut un bon vélo.
Rédigé par : Pascalou | 11 avril 2011 à 21:33