Cyclisme Info par Jean-Paul Brouchon

Le Tour paye la dot

En 1947, le Tour renaissait après dix ans d'interruption. Il comptait 21 étapes sur une distance de 4.642 km. Après les années de guerre et d'Occupation, c'est celui qu'il fallait gagner. Parmi les 99 partants, se trouvait Jean Robic, alias "Tête de cuir", "Trompe la mort", "Fatalitas", qui gagnera ce Tour sans avoir porté le maillot jaune qu'il endossera seulement au Parc des Princes pour effectuer son tour d'honneur, après un raid entre Caen et Paris, très exactement dans la côte de Bonsecours, à 130 km de la capitale.
Robic, le rival de Bobet, avait fait une promesse à sa femme, Raymonde qu'il avait épousé quelques jours avant le départ : "Je n'ai pas de dot à t'offrir, mais dans un mois, nous serons riches. Je te rapporterai le premier prix du Tour de France : 500.000 francs (76.000 euros) qui changeront notre vie." "Tu es bien sûr de toi", dit Raymonde. "Il faut être sûr de soi quand on est coureur cycliste. Sinon, on change de métier", répondit le champion qui tint sa promesse.
Retraité, déstabilisé par son divorce, Jean Robic est mort comme il avait vécu, tué par une ultime fanfaronade : au retour d'un dîner qui clôturait une épreuve de gentlemen, il reprit la route vers une heure du matin, contre l'avis de Poulidor et de Zoetemelk qui le supplièrent de repartir le lendemain matin. Il ne voulut rien entendre.
Une brume épaisse recouvrait la région parisienne. Sa voiture percuta un semi-remorque. "Fatalitas" ne pouvait sans doute pas échapper à son destin. Il avait 59 ans...

J.A.

14 juillet 1989 : le Tour fait sa révolution

Le 14 juillet 1989 - l'année où Jean-Marie Leblanc prend les commandes de la Grande Boucle -, pour fêter le bi-centenaire de la Révolution Française, le Tour offre une prime spéciale de 17.890 francs (2727,31 euros) au km 1789, à Martres-Tolosane (Haute-Garonne) dans l'étape Luchon-Blagnac, remportée par le Hollandais Mathieu Hermans. C'est le coureur Belge, Joseph Haex, de l'équipe Hitachi, qui l'empoche.
Un autre coureur portant les couleurs tricolores aurait pu marquer de son empreinte cette année de célébration de la Révolution Française : Laurent Fignon, en bisbille avec Greg Lemond dès la cinquième étape. On connait la suite : la veille de l'arrivée sur les Champs-Elysées, le Français de Super U possède 50 d'avance sur l'Américain qui le domine dans la dernière étape contre la montre. Il gagne le Tour avec 8 secondes d'avance, le plus faible écart jamais enregistré dans l'épreuve. D'après les pointages, cette victoire a été arrachée devant l'ambassade américaine, place de la Concorde
Laurent Fignon est effondré. Greg Lemond, déjà vainqueur en 1986 et futur gagnant en 1990, vient le consoler en lui disant : "J'imagine ta déception, mais je pense que tu as gagné le Giro." "Le Giro, je m'en fous ! C'est un troisième Tour que je voulais.", lance, désabusé le Français.

J.A.

Robic, un champion de "poids"

Brillant grimpeur, mais pénalisé dans les descentes pour sa "minceur" (c'est un poids "léger"), Jean Robic - vainqueur du Tour 1947 - avait mis au point, dans le Tour 1953, une strarégie pour descendre plus vite, en accord avec son directeur sportif, l'ancien coureur breton Léon Le Calvez. Celui-ci lui passait au sommet des cols, notamment au sommet du Tourmalet, un bidon rempli de limaille de plomb. Robic s'alourdissait immédiatement de 10 kilos pour faire la descente... 

J.A.

Quand Bernard Thévenet rêvait en jaune

Tour de France 1975. Bernard Thévenet s'empare du maillot jaune dans la fameuse étape Nice-Pra-Loup où il
prend près de trois minutes à Eddy Merckx dans les six derniers kilomètres. Le champion belge est son idole.
Le soir, dans sa chambre d'hôtel, il dispose son maillot jaune bien en évidence pour le voir de son lit. Au milieu de la nuit, il se réveille en sursaut et son regard se porte aussitôt sur cette tunique si chèrement acquise. Entre rêve et réalité et encore sonné par son exploit, il s'écrit : " Mais qu'est-ce-que je fais dans la chambre d'Eddy ? "...
Le 20 juillet, Bernard Thévenet
 remporte son premier Tour de France (en 1977, il gagnera une deuxième fois) alors que la Grande boucle inaugure sa première arrivée sur les Champs-Elysées.

J.A.

Oscar Pereiro a rebondi au foot !

Vainqueur du Tour 2006 par défaut - Floyd ,Landis ayant rendu son maillot jaune pour dopage -, le coureur de la formation Caisse d'Epargne n'était sans doute pas plus "propre" que l'Américain de Phonak : on se souvient qu'il fut contrôlé positif au salbutamol à deux reprises sur le Tour. Landis ne lui envoya pas dire : "C'est lui qui va rester au palmarès, mais
il est aussi coupable que moi." Pereiro fut tout de même blanchi par l'Agence française de lutte contre le dopage avant de mettre un terme à sa carrière cycliste en 2010 sous les couleurs d'Astana. Pour mieux embrasser celle du football professionnel, son rêve d'enfant. Il signa alors un contrat dans un club de troisième division espagnole, "Coruxo FC", situé en Galice, près de Vigo. Une reconversion unique dans l'histoire du cyclisme.

J.A.

Petit-Breton sur les rails

En des temps "héroïques", le réglement du Tour de France permettait aux coureurs ayant abandonné de reprendre la course (hors classement général, bien entendu). C'est ainsi que dans le 1er Tour, en 1903, le français Hyppolite Aucouturier, éliminé par une multitude de crevaisons au cours de la première étape Paris-Lyon (467 km !), remporte la deuxième Lyon-Marseille (374 km).
Même ca de figure pour Lucien Petit-Breton - de son vrai nom Lucien Mazan et surnommé "l'Argentin" (il avait passé sa jeunesse à Buenos-Aires), qui remporta le Tour en 1907 et 1908 - En 1905, il crève sept ou huit fois au cours de la première étape Paris-Nancy. Découragé, il rentre à Paris. Le lendemain matin, en allant chercher des croissants, il croise par hasard Robert Coquelle, journaliste de l'"Auro". "Je te croyais dans le Tour de France", s'étonne Robert Coquelle. Petit-Breton lui raconte sa mésaventure. "Il faut continuer", répond le journaliste qui le persuade de repartir. Le coureur saute dans le premier train et pas n'importe lequel : l'Orient-Express. Et prend ainsi le départ de la deuxième étape...

J.A.

Jacques Augendre, notre nouvel équipier sur le Tour

Une nouvelle signature rejoint notre équipe : celle de Jacques Augendre, qui, en mémoire de son ami Jean-Paul et par amitié pour notre petite entreprise, a accepté de prêter sa plume à www.jeanpaulbrouchon.fr en nous racontant, sous forme d'anecdotes, ses "Petites histoires du Tour", lui qui en a couvert 55 - après Jean-Paul, c'est le recordman chez les journalistes qui ont participé à la Grande boucle ! 
Tour à tour défileront Lucien Petit-Breton, Eugène Christophe, Antonin Magne, Jean Robic, Fausto Coppi, Henry Anglade, Bernard Thévenet, Bernard Hinault, Laurent Fignon, Miguel Indurain, Lance Armstrong, Floyd Landis... Tous, peu ou prou, ont été les "héros" de la vingtaine d'ouvrages qu'a écrits Jacques Augendre parmi lesquels "L'Abécédaire insolite du Tour", son dernier livre, publié l'an dernier (Editions Solar).
Pour illustrer ces "Petites histoires du Tour", laissons-le révéler cette anecdote en forme d'hommage à Jean-Paul : "Un jour, dans le Tour, Jean-Paul, en dépit de son calme légendaire, commence à stresser. Il doit faire une interview de Joop Zoetemelk. L'heure du flash arrive. Et pas de Joop... Mais, Pierre Douglas, le journaliste-chansonnier-imitateur se trouve à ses côtés. C'est l'homme providence. "Ne t'affole pas, Jean-Paul, lui dit-il. Mes deux spécialités, c'est Georges Marchais et Léon Zitrone. Cependant, je peux aussi imiter Zoetemelk. Tu vas voir... ou plutôt entendre" "Tout s'est parfaitement passé. Je tiens cette histoire vraie de Pierre Douglas lui-même", témoigne Jacques Augendre que nous remercions de sa précieuse collaboration.

21 juillet 1910 : les Pyrénées pour la première fois...

 Alphonse Steines est chargé par Henri Desgrange, dès 1903, de tracer l’itinéraire du Tour. C’est lui qui, une fois les villes-étapes retenues – les plus grandes de préférence pour y vendre le plus d’exemplaires possibles de "l’Auto" – détermine les emplacements de départ et d’arrivée, reconnaît le parcours la plupart du temps à vélo, retient les hôtels et entreprend avec le correspondant local de "l’Auto" les démarches nécessaires pour l’établissement des contrôles placés sur le parcours.

Autant   à la fin du Tour 1903, Henri Desgrange est satisfait du déroulement de son épreuve, autant il maugrée en  privé contre l’apathie des coureurs. La course, en effet, ne fut qu’une élimination avec peu d’offensives. Le vainqueur Maurice Garin s’impose avec trois heures d’avance sur Lucien Pothier, classé deuxième et quatre heures trente sur le troisième Fernand Augereau.

  Alphonse Steines réussit à convaincre Henri Desgrange que pour être populaire le Tour doit frôler les frontières, longer les côtes et franchir la montagne. C’est ainsi qu’il introduit en  1905 le Ballon d’Alsace dans les Vosges, la côte de Laffrey et le col Bayard dans les Alpes. En 1906, le Tour franchit sa première frontière à Metz, alors allemand, puis à Vintimille sur la route de Nice et enfin à Irun avant l’arrivée à Bayonne.

Paris-Roubaix ; Pourquoi l'enfer du nord ?

En 1919, dès la fin de la première guerre mondiale, la course cycliste Paris-Roubaix est à nouveau organisée. Le traité de Versailles n’a pas encore été signé. Beaucoup de soldats ne sont pas encore démobilisés. Le peloton a perdu des unités. Lapize,  Petit-Breton, Faber et bien d’autres sont morts au combat. Le parcours a été modifié car certaines routes sont complètement inutilisables en raison de la violence des bombardements. 

On est ainsi contraint d’éviter Arras. Eugène Christophe, le Vieux Gaulois, part reconnaître le nouveau parcours en compagnie d’un journaliste du Petit Journal. A partir de Doullens, le paysage n’offre que désolation. Les arbres déchiquetés ressemblent vaguement à des squelettes, les chemins sont défoncés, troués,éventrés par les obus. La végétation est rare. Elle est remplacée par des véhicules militaires en piteux état. Les maisons des villages ne sont plus que des pans de murs déchiquetés. A leurs pieds des masses de gravats. Eugène Christophe s’exclame «  Ici, c’est vraiment l’Enfer du Nord » ...

Paris-Roubaix ; Quelques formules

Le peloton de Paris-Roubaix, un, indivisible, se casse par vagues, se courbe par creux, se hérisse par crêtes onduleuses dont chacune porte un nom.

Antoine Blondin dans une chronique intitulée «  Deboue les morts »

Quand on s’appelle Bernard Hinault et Paris-Roubaix  on est fait pour coucher ensemble. René Fallet.

Paris-Roubaix ; Pourquoi la Pascale ?

Roubaix à la fin du XIX°  siècle s’enorgueillit de son vélodrome vers lequel converge chaque dimanche une foule de spectateurs issue de ses entreprises de filature textile. Deux filateurs, Théo Vienne et Maurice Pérez décident de donner du lustre au vélodrome dont ils sont les propriétaires. Ils décident d’organiser un Paris-Roubaix cycliste.

Victor Breyer, l’une des plumes du quotidien Vélo est chargé de la mise en œuvre de ce projet. Il part reconnaître le parcours. En voiture ( une Panhard de 7 CV dont il faut vérifier le niveau d’huile  tous les 50 km ) de Paris à Amiens puis après une bonne nuit de repos le reste du trajet en bicyclette. Il pleut pratiquement toute la journée ... 

Pierre Brambilla au fond du trou - Les petites histoires du Tour

En 1947, Jean Robic gagne le Tour au cours de la dernière étape au détriment de Pierre Brambilla. Ce dernier, fou de rage, regagne son domicile de la région parisienne et aussitôt enterre son vélo au fond de son jardin. Le lendemain, toutefois, il déterre sa machine et continue à participer à des épreuves cyclistes.

J.P.B.

Tour de France : la lanterne rouge, une coutume qui s'éteint

Autrefois, on se battait pour être le dernier du classement général, histoire de mieux monnayer l’après-Tour.

Après l’abandon sur chute du Hollandais Kenny Van Hummel de l’équipe Skil-Shimano dans l’étape Bourg-Saint-Maurice/Le Grand-Bornand, c’est un Bélarus de 25 ans, Yauheni Hutarovich de La Française des Jeux qui a l’insigne honneur d’être bon dernier au classement général de ce Tour 2009 en se classant 156 ème de l’épreuve et qui hérite donc symboliquement de la fameuse « Lanterne rouge », une tradition aussi vieille que le Tour, inspirée par la lanterne qui signalait l’arrière des trains. Pour autant, Yauhen Hutarovich, professionnel depuis 2007 (Roubaix Lille Métropole, l'équipe de Cyril Guimard), s'est aussi distingué en remportant une étape du Tour Méditerranéen et s'est classé 22ème de Paris-Roubaix 2009.

Il fut un temps où cette lanterne rouge - dont le premier, en 1903, fut Arsène Millocheau, en 64h47’ ! - était très recherchée parce qu’elle assurait des contrats lucratifs d’après-Tour à son titulaire ...

Il se marie grâce au Tour - Les petites histoires du Tour

En 1957, Nicolas Barone (équipe Ile-de-France) endosse la maillot jaune au terme de l’étape Metz-Colmar. Pour sa famille, il est un héros. Ses parents acceptent même qu’il épouse après le Tour la fiancée qu’il s’est choisie, ce qu’ils avaient toujours refusé jusque là...

J.P.B.

Bobet sans maillot - Les petites histoires du Tour

En 1954, Louison Bobet est maillot jaune à Saint-Brieuc. Il reçoit le soir de l’étape la visite de sa sœur et lui donne son maillot jaune. Bobet a oublié que cette année-là les maillots fournis par l’organisation ne sont changés que tous les deux jours et le lendemain n’est pas le bon jour. Son soigneur Raymond Le Bert, qui habite non loin de là, part vite chez lui chercher un ancien maillot jaune que Louison lui a donné l’année précédente. %Mais le maillot a rétréci au lavage. Bobet ne peut pas l’enfiler. On fait alors appel à un boxeur poids lourd de Saint-Brieuc, qui a pour tâche d’élargir le maillot jaune, ce dont il s’acquitte honorablement. Et Bobet a pu prendre le départ de l’étape avec un maillot jaune élargi...

J.P.B.

Tour de France 1952, Jacques Geus - Les petites histoires du Tour

En 1952, la Fédération belge refuse de sélectionner Jacques Geus pour le Tour de France. Le maire de Bruxelles intervient et Geus est finalement incorporé dans l’équipe de Belgique B. Geus est affligé d’un handicap. Il est sourd. Mais cela ne l’empêche pas de pédaler vite et bien surtout en montagne. 12° à Briançon, 12° à Aoste et 12° à Lausanne, il termine ce Tour 52 à la 27° place sur 55 arrivants. 

Tour de France : le Col de l'Escrinet, Géminiani, les écolos et les chasseurs...

A 16 kilomètres de l'arrivée, à Aubenas, le col de l'Escrinet, en Ardèche (787 m, classé en deuxième catégorie), où le peloton passera vers 16h40, est le théâtre de deux faits qui n'ont absolument rien en commun, mais qui lui assure une certaine réputation.
Pour les amateurs de légende et les historiens du cycle, ce col est indissociable du nom de Raphaël Géminiani, alias " le grand fusil ", 2^e en 1951 et 3^e en 1958 du Tour, lieutenant et ami de Fausto Coppi, directeur sportif de Jacques Anquetil (à qui il fit gagner quatre Tours) et personnage haut en couleur. En 1960, au cours de la première étape du Dauphine-Libéré, ... 

Laurent Fignon perd le maillot jaune à Paris pour 8 secondes! Tour de France 1989 - Les petites histoires du Tour

Quand le départ du Tour 1989 est donné à Luxembourg, on suppose pour la victoire finale une lutte à trois : Laurent Fignon, Greg LeMond et Pedro delgado. Delgado s’élimine de lui-même le premier jour en se présentant sur la ligne de départ du prologue avec près de trois minutes de retard sur l’horaire fixé. Le cinquième jour, entre Dinard et Rennes, sur les 73 km du parcours contre la montre, LeMond devance Fignon et s’installe en tête du classement général. LeMond, ce jour-là utilise une machine munie d’un accessoire utilisé par les triathlètes. C’est un appendice au guidon qui permet un meilleur aérodynamisme.

A Super-Bagnères,  Fignon prend le maillot jaune mais le perd à Orcières-Merlette pour le reprendre à l’Alpe d’Huez. Dès lors, il peut envisager la victoire finale.

La dernière étape se dispute contre la montre entre Versailles et Paris ...

LeMond bat Fignon de 8 secondes pour la victoire finale du Tour de France 1989 - Les petites histoires du Tour (suite)

Vidéo de l'arrivée du Tour de France 1989. Maillot Jaune avant le départ de la dernière étape, Laurent Fignon va perdre la première place au profit de Greg Le Mond pour 8 secondes !

Un moment d'anthologie du Tour de France.

Lire les détails du duel LeMond - Fignon lors du Tour 1989

Tour de France 1960, Trois semaines de perdreau pour les journalistes - Les petites histoires du Tour

La plus connue des histoires d’Antoine Blondin. Dans les années 60, les rédactions des journaux organisateurs L’Equipe et Le Parisien Libéré logent à l’hôtel de direction et partagent le même repas. Le menu est invariable. Entrées, poisson, viande, fromage et dessert. Cette année-là, le plat de viande est toujours du perdreau. Le cinquième jour, Antoine Blondin s’adresse à Jacques Goddet «  Si le perdreau doit nous suivre jusqu’à Paris, autant lui donner tout de suite un dossard « . En fait, Claudy Levitan, la fille de Felix Levitan, avait par erreur envoyé le même type de menu à tous les hôteliers du Tour. 

Le peloton et... les ravitaillements à la mer, Tour de France 1950 - Les petites histoires du Tour

En 1950, il fait une chaleur étouffante sur les routes du Tour . C’est la canicule. Au cours de Toulon-Menton, le peloton traverse Sainte-Maxime et longe la plage. A l’initiative d’Apo Lazarides, une grande partie du peloton pique une tête dans la mer. André Brulé, toujours aussi facétieux pénètre même dans l’eau sans descendre de machine. Les coureurs reprennent la route pour se rendre compte qu’ils se sont baignés en laissant leur ravitaillement dans leurs poches. Les sandwiches, les gâteaux de riz, les cuisses de poulet imprégnés d’eau salée sont immangeables. Résultat : le luxembourgeois Bim Diederich gagne l’étape. Il avait été l’un des rares à ne pas se jeter à l’eau.

Zaaf réveillé au rosé finit en ambulance, Tour de France 1950 - Les petites histoires du Tour

Il n’est pas possible d’évoquer Zaaf sans parler de l’étape Perpignan-Nîmes du Tour de France 1950. Ce jour-là, Zaaf donne des signes de grande lassitude à 28 km de l’arrivée, des signes de si grande lassitude qu’il s’écroule inanimé au pied d’un platane. Nous sommes dans une région vinicole. L’eau en bouteille plastique n’existe pas encore. Ici quand on a soif, on boit une gorgée de vin si possible rosé. Emus par l’état de Zaaf, des spectateurs l’aspergent avec un peu de vin. Les secours arrivent. Les journalistes aussi. Tout le monde constate que le coureur sent le vin. La légende aussitôt s’incruste. Zaaf est ivre. Zaaf qui a ouvert un œil pense aux juteux contrats d’après-Tour qu’il va pouvoir obtenir s’il profite de la situation. Une fois debout, il reprend sa machine mais en sens inverse de la course. Finalement, il termine l’étape dans l’ambulance et le lendemain sur la ligne de départ de l’étape suivante, il supplie Jacques Goddet de lui laisser accomplir les 28 km qu’il a parcouru la veille en ambulance. Refus de Jacques Goddet mais cette année-là. Zaaf a bien gagné sa vie grâce aux contrats d’après-Tour, beaucoup plus en tout cas que son équipier Molines, vainqueur de l’étape ce jour-là.

Et dire que Zaaf, de religion musulmane, n’a jamais bu une goutte d’alcool de sa vie.

Sarkozy sur le Tour de France, une tradition présidentielle...

Nicolas Sarkozy a donc annoncé sa présence aujourd'hui sur le Tour de France pour suivre l'étape Bourg-Saint-Maurice/Le Grand-Bornand, dans la voiture de Christian Prudhomme, comme il l'avait déjà fait en 2007 lors de l'étape Val-d'Isère/Biançon, quelques mois à peine après son élection, où il avait suivi les 45 derniers kilométres. De tous les présidents de la Cinquième République, il est le plus fidèle supporter du Tour de France. " Le Tour de France est un évènement populaire, c'est un évènement qui présente la France au monde entier. C'est une course qui fait partie des petits bonheurs de nos compatriotes ", avait déclaré le président derrière ses Ray-Ban noires, qui avait aussi donné un satisfecit aux organisateurs dans leur lutte pour " un Tour propre ". Annoncé l'an dernier, il avait déclaré forfait au dernier moment, en raison d'un agenda surchargé.

Un jour, le général de Gaulle avait dit au directeur du Tour : " Je suis président des Français pendant 11 mois et vous pendant un mois..." ...

Hugo Koblet seul contre tous, Tour de France 1951 - Les petites histoires du Tour

En 1951, pour la première fois de son histoire le Tour ne part pas de Paris mais de Metz. L’équipe de France est regroupée autour de Louison Bobet, celle d’Italie autour de Gino Bartali et de Fausto Coppi mais Bartali est vieillissant et Coppi est très meurtri par la mort de son frère Serse. L’équipe suisse a pour leader Hugo Koblet qui l’année précédente a remporté le Tour d’Italie.

Koblet surclasse tout le monde dans le contre la montre entre La Guerche et Angers ( 85 km ) notamment Bobet et Coppi qui terminent cette étape aux 2° et 3° place. Quatre jours plus tard, c’est l’étape Brive-Agen. Koblet, 37 km après le départ de Brive, à Lanzac démarre dans une légère descente ...

Duel Guimard - Merckx, Tour de France 1972 - Les petites histoires du Tour

Sur le Tour de France 1972, Cyrille Guimard jusqu’alors inconnu du grand public livre un féroce combat à Eddy Merckx. La France même non sportive se passionne alors pour ce petit breton au caractère bien trempé qui n’a pas peur de l’ogre belge. Merckx gagne le prologue mais le lendemain Guimard gagne la première étape et ravit le maillot jaune au belge. Merckx reprend son bien à la faveur d’une étape contre la montre mais Guimard regagne une étape le lendemain et se retrouve une nouvelle fois maillot jaune. Guimard ne cède son bien qu’au cours de la deuxième étape des Pyrénées. Survient l’étape du Mont-Revard, une course de côte. A 50 m de la ligne, Merckx croît avoir course gagnée. Il lève le bras droit en signe de victoire lorsque malin comme un singe, Guimard surgit, passe sous le bras levé du belge et de justesse ainsi que le confirme la photo-finish devance de quelques centimètres le champion belge qui mit longtemps à admettre sa défaite.

Eddy Merckx remporte ce Tour que Cyrille Guimard ne termine pas, contraint à l’abandon victime d’un genou douloureux la veille de l’arrivée à Paris.

Tour de France 1972 - Thevenet K.O. - Les petites histoires du Tour

En 1972,  la lutte annoncée Merckx-Ocana ne se produit pas. Elle se transforme en un duel Guimard-Merckx. Dans les Pyrénées, Merckx est irrité de voir Guimard toujours collé à sa roue même dans les ascensions les plus rudes Au cours de la première étape de haute montagne Bayonne-Pau, Merckx accélère l’allure en vue du sommet du col de l’Aubisque et poursuit son effort dans la descente acrobatique et dangereuse du balcon du Soulor. Ocana qui a crevé dans le Soulor est en chasse en compagnie d’Alain Santy et de Bernard Thevenet. Le temps est beau, la route sèche, Merckx comme à son habitude dégringole à grande vitesse entraînant dans son sillage Guimard, Hézard, Poulidor, Gimondi et Zoetemelk. A l’entrée d’Arthez-d’Asson alors que la descente est presque terminée Ocana, gêné par des voitures mal garées modifie sa trajectoire et se retrouve à terre ... 

Duel au sommet Ocana / Merckx, 1971 - Les petites histoires du Tour

Le 9 juillet 1971, c’est l’étape Grenoble-Orcières-Merlette. Pour tous les coureurs la nuit a été courte. L’étape du jour est courte mais difficile avec la Côte de Laffrey peu après le départ. Merckx a connu la veille des inquiétudes. Il a perdu plus d’1.30 sur Ocana et a du céder son maillot jaune à Zoetemelk. Dès les premiers mètres de l’ascension de Laffrey, Agostinho attaque suivi comme son ombre par Van Impe et Ocana. Merckx et Zoetemelk ne peuvent pas suivre. Et Ocana, sous un soleil de feu, s’en va seul vers la ligne d’arrivée. Ocana flamboie sous le soleil alors que Merckx presque couché sur sa machine progresse avec peine. A l’arrivée, Ocana devance Merckx de presque neuf minutes.

Le lendemain, c’est journée de repos. Ocana est tout à sa joie. Merckx rumine un plan d’attaque pour récupérer son bien.

A soleil à peine levé ... 

1971, Ocana / Merckx - Les petites histoires du Tour

En 1971, Eddy Merckx veut absolument refaire son retard sur Luis Ocana. Dans les Pyrénées, il attaque à tout va dans l’espoir de faire plier l’espagnol. Dès la première étape de haute montagne de ce massif au cours de Revel-Luchon, le belge mène un train d’enfer dans chaque ascension de col et agit de même dans la descente qui suit.aussi . Pour Merckx, tous les terrains sont bons pour reprendre la première place du classement général. Ce jour-là, il fait une chaleur étouffante, lourde. Le ciel est sombre. L’orage menace. Il éclate avec une rare violence alors que le groupe maillot jaune aborde le sommet du col de Mente La route de la descente se transforme subitement en patinoire. Des petits torrents de boue et des miasmes de la nature jonchent le sol. La visibilité est réduite. Les éclairs zèbrent le ciel. Le tonnerre fait un fracas épouvantable répercuté par l’écho des montagnes. Merckx n’en a cure. Il mène le groupe à grande vitesse. Ocana le suit. Dans un virage en épingle à cheveux, Merckx perd un peu l’équilibre mais se rétablit de justesse et continue son forcing comme si de rien n’était. Derrière lui Ocana ne peut éviter la chute. Il se relève mais est percuté par Zoetemelk puis par Agostinho. Ocana reste à terre. Il abandonne plus choqué que blessé. Une ambulance le transporte dans une clinique de Saint-Gaudens qu’il quitte le lendemain. Merckx remporte ainsi ce Tour de France qu’il avait bien failli perdre.

Plus tard on apprend que ce jour-là Ocana, toujours à la recherche d’une amélioration technologique, utilisait un vélo à base d’un matériau très léger, le titane. Cette machine était sans aucun doute utile dans les montées mais ne convenait pas dans les descentes en raison de son manque de tenue de route  Deux ans plus tard, en 1973, Luis Ocana remporte le Tour en surclassant ses rivaux.

A lire aussi :

Les autres petites histoires du Tour

Tour de France 1986, Bernard Hinault - Les petites hitoires du Tour

En 1986, c’est le dernier Tour de France de Bernard Hinault. Hinaut doit tout faire pour obéir à son patron Bernard Tapie et  aider son coéquipier Greg LeMond à gagner le Tour. Dans les Pyrénées, Hinault montre une agressivité folle. Il s’empare du maillot jaune à Pau avec 5.25 d’avance sur LeMond. Le lendemain, l’américain revient à 40 secondes d’Hinault. Voici maintenant les Alpes. Au cours de Gap-Serre-Chevallier, Hinault souffre du genou. Il est loin des premiers. Dans l’ultime ascension, une moto de la télévision se porte à sa hauteur. Il entend grâce au haut-parleur de la moto  Patrick Chêne, le commentateur de la TV ordonner au cameraman de rester au contact d’Hinault pour «  avoir son abandon en direct ». Hinault ne veut surtout pas abandonner devant la caméra de télévision. Il serre encore plus fort les dents, vainc par tous les moyens possibles sa douleur qui se fait de plus en plus intense et franchit péniblement la ligne d’arrivée dépossédé par l’américain de son maillot jaune et redescendu à la troisième place du classement général. Le lendemain, c’est l’étape de l’Alpe d’Huez avec l’une des plus belles étapes du Tour de ces trente dernières années. Hinault et LeMond franchissent la ligne d’arrivée main dans la main après avoir écrasé l’ensemble de leurs rivaux.

1966, Poulidor sans oreillettes... - Les petites histoires du Tour

En 1966 Jacques Anquetil dispute son dernier Tour. Une fois de plus son principal rival est Raymond Poulidor. On est à six jours de l’arrivée. Le classement général est ouvert. Janssen est maillot jaune devant Aimar à 27 secondes et Mugnaini 3° à 1.48. Puis suivent Poulidor qui à deux reprises a devancé Anquetil ( contre la montre à Privas puis dans la descente du Col d’Ornon avant l’arrivée à l’Alpe d’Huez ). Aujourd’hui c’est la 17° étape, une étape courte entre Briançon et Turin avec l’ascension du col de la Coletta au 100° km. Peu avant le départ, Felix Levitan comme il le fait parfois invite à prendre place à bord de sa voiture l’un des journalistes du Parisien ... 

1929, la première caravane publicitaire - Les petites histoires du Tour

La caravane publicitaire n’est pas née en 1930 mais en 1929. A cette date, le chocolat Menier distribue des tonnes de chapeaux en papier et de tablettes de chocolat sur la route du Tour. Pendant l’hiver 1929 Henri Desgrange  demande à son directeur de publicité Robert Desmaret (père de Sophie Desmaret) d’étudier la viabilité de la présence d’une «  publicité ambulante ». Desmaret prend langue avec quelques firmes et en 1930 apparaît la première caravane publicitaire. Quatre firmes sont au rendez-vous :

Chocolat Menier,

Fromagerie Bell ( Vache Qui rit )

Bicottes Delft

Montres Noveltex

Les véhicules ferment la route. Ils passent après les coureurs.

Le Tour à la carte - Petites histoires du Tour

Au début des années 1900, le géographe Vidal-Lablache n'arrive pas à imposer ses cartes dans les écoles. Il dessine alors des cartes représentant le parcours du Tour de France. C'est aussitôt le succès. Grâce au Tour, les écoliers de France peuvent depuis situer sur une carte les villes-étapes.

J.P.B.

De l'alimentation du cycliste - Petites histoires du Tour

Après la première étape du Tour 1903, Maurice Garin ( 1,69 m pour 61 kg) avale deux poulets, quatre beafsteacks, une omelette de dix œufs et douze bananes, le tout arrosé d’une bouteille de Bordeaux. Le baron de Civrac qui, paraît-il, avait quelques notions de médecine, a écrit un livre sur l’alimentation du vélocipédiste. Il y préconise l’interdiction de boire du lait, car les tressautements de la route peuvent transformer le lait dans l’estomac en beurre !

 

J.P.B.

1903, déjà la cocaïne ! Les petites histoires du Tour

En 1903, année du premier Tour de France, les coureurs utilisent en guise de "reconstituants" : champagne, vin rouge, guignolet, alcool de menthe, soupe, œufs, chocolat et un vin" dit "vin Mariani", inventé par un pharmacien corse. C’est un vin à base de cocaïne. Ce vin, plus tard, fut introduit aux Etas-Unis. Transformé par un médecin de Géorgie, le docteur Pamberton, mélangé à de l’extrait de noix de cola et du soda, il est devenu le Coca-Cola !

 

J.P.B.

Rendons à Lucien Barroy ce qui est à Lucien Barroy... Les petites histoires du Tour

On dit toujours qu’Eugène Christophe a accompli le premier grand exploit du Tour en réparant lui-même en 1913 la fourche de sa machine, endommagée dans la descente du Tourmalet.
En fait, dix ans auparavant, Lucien Barroy réalisa le même exploit, passé totalement inaperçu. Au cours de Lyon-Marseille, il cassa son cadre, répara seul sa machine et termina l’étape avec un retard de 13 heures sur le vainqueur Hyppolite Aucouturier . Barroy ne termina pas le Tour; il abandonna au cours de l'étape Marseille-Toulouse.

J.P.B.

Colette n'a pas passé son Tour ! - Petites histoires du Tour

La première femme "officielle" sur le Tour fut l’écrivain Colette qui, mariée au directeur du journal Le Matin, Henry de Jouvenel, suivit la dernière étape du Tour 1912 et publia le lendemain dans le journal de son mari une chronique sur le Tour.

J.P.B.

Cherchez la femme ! - Les petites histoires du Tour

Durant bien des années, la présence des femmes de coureurs fut interdite sur le Tour. Cependant, dès 1903, certaines bravèrent cet interdit.

En 1903, la femme du coureur Alexandre Fourreaux, dit "le menuisier volant",  était présente à toutes les arrivées. Elle se déplaçait en train. Fourreaux termina 16 ème sur 21 du Tour et ne fait pas partie de la liste de ceux qui ont gagné un prix.

Toujours en 1903, Le coureur Marcel Valpic, qui n’apparaît pas sur la liste des partants, mais dispute le Tour tout de même, et se fait aussi appeler Marcel Vallée-Picard, retrouve sa mère à chaque arrivée. Elle lui fait la cuisine n’ayant aucune confiance dans les hôteliers de l’époque. En fait, on apprend plus tard que Valpic est  "l’entraîneur caché" d’Hippolytre Aucouturier, qui dévore, bien entendu, à chaque étape la cuisine de Maman Valpic.

 

Jean-Paul Brouchon

Le premier col du Tour - Les petites histoires du Tour

On attribue généralement au Ballon d’Alsace le qualificatif de premier col escaladé par les coureurs du Tour en 1906. En fait, le premier col du Tour fut le Col des Echarmeaux, gravi en 1903, au cours de la première étape Paris-Lyon. Ce col est situé sur l’ancienne route reliant Lyon à Autun et est encore l’un des chemins utilisés par les pélerins de Saint-Jacques de Compostelle. Ce col est encore utilisé pour la course Paris-Nice.

Un autre col fut escaladé au cours de ce Tour 1903, le Col de la République, à la sortie de Saint-Etienne, au cours de l’étape Lyon-Marseille. Ce col doit son nom au fait qu’une secte dite " des Béguins " voulut y installer en 1794 une « République de Jésus-Christ ». Les gendarmes ont délogé cette secte. Seul le nom République est resté.

Jean-Paul Brouchon

300 km avec un vélo... sur le dos ! Les petites histoires du Tour

Léon Scieur est le vainqueur du Tour 1921. Porteur du maillot jaune, il tombe au début de l’avant-dernière étape Metz-Dunkerque et brise onze rayons de sa roue arrière. Il trouve une roue de rechange, mais comme le règlement le stipulait à l’époque, il doit franchir la ligne d’arrivée avec la roue endommagée. Il la fixe alors sur son dos et parcourt les 300 km restants avec cet encombrant bagage sur le dos. 

Au fur et à mesure qu’il progresse vers l’arrivée, le moyeu de la roue s’enfonce dans sa chair. Il fait fi de la douleur et remporte le Tour. Toute sa vie il portera ensuite une énorme cicatrice, souvenir de ses heures douloureuses sur la route de Metz à Dunkerque.

 

Jean-Paul Brouchon

1954 Federico Bahamontes s'arrête manger une glace - Les petites histoires du Tour

En 1954, Federico Bahamontes, encore inconnu du grand public passe en tête au sommet du Galibier. Jugeant son avance assez grande sur ses suivants immédiats, il s’achète une glace ou se la fait offrir par un marchand ambulant et attendant tranquillement ses adversaires pour reprendre sa route. Il avait déjà fait le même geste lors du Critérium du Dauphiné Libéré. Il explique son geste par le fait qu’il n’était pas sur le Tour pour remporter le classement général mais uniquement pour remporter le classement de la montagne.