Hécatombe de chutes au Tour des Flandres causées par des suiveurs. L'UCI va-t-elle enfin se mêler de la sécurité des coureurs ?
Le cyclisme est un sport à risques, on le sait. Parce que la chute est présente en permanence dans le peloton et que de plus en plus d’obstacles artificiels se présentent devant les coureurs (chicanes, ronds-points, terre-pleins, rétrécissements de chaussée, trottoirs, etc). Les descentes de cols sont dangereuses et l’on ne parle pas des sprints qui font souvent froid dans le dos ! Mais quand, en plus, ce sont les voitures officielles qui sèment la pagaille et font tomber les coureurs, comme cela s’est passé au Tour des Flandres avec la voiture Shimano de dépannage neutre, il y a quelque chose d’insupportable et de révoltant. Certes, les coureurs sont appelés par la force des choses (crevaison, ennui technique, ravitaillement, lâchage, etc) à évoluer au milieu des voitures et la cohabitation n’est pas facile. Elle peut provoquer des situations tendues et délicates en cas de dépassement. Souvent cela passe au millimètre et il faut des conducteurs expérimentés pour éviter le pire. Apparemment ceux de la firme Shimano sont à remplacer au plus vite pour éviter d’autres désastres !
On se souvient d’ailleurs de quelques exemples fameux. Le malheureux Danois Skibby en tête dans le Koppenberg (Tour des Flandres 1987) et percuté par la voiture d’un commissaire UCI qui force le passage et roule ensuite sur son vélo ; l’Australien Scott Sunderland (Palmans) renversé par la voiture TVM pilotée par le directeur sportif Cees Priem et qui a failli lui rouler dessus à l’Amstel Gold Race 1998 ; les deux échappés Flecha et Hoogerland envoyés dans les décors par une voiture de France Télévisions qui les a dépassés là où il n’y avait pas la place sur le Tour de France 2011. Hoogerland finira sa course dans les fils de fer barbelés et devra recevoir 33 points de suture ! La liste n’est pas exhaustive.
Que penser aussi de la chute de Fabian Cancellara fin mars au GP E3, à Harelbeke, à cause d’un bidon jeté par un coureur et qui a rebondi sous sa roue ? Résultat : deux vertèbres fracturées et adieu les Classiques et la première partie de la saison 2015. Une attitude irresponsable et qui ne doit plus être tolérée par l’UCI qui doit mettre de l’ordre dans son règlement ! Jeter son bidon pour s’en débarasser en course doit être interdit car c’est dangereux pour les autres coureurs et peu respectueux de l’environnement. C’est dans ce sens-là que l’organe directeur doit intervenir pour rétablir son autorité dans un secteur où l’UCI est aux abonnés absents depuis trop longtemps : la sécurité !
Sous prétexte d’évoluer vers le sport-spectacle, le cyclisme est de plus en plus souvent en accusation désormais. Yvon Ledannois, le directeur sportif de l’équipe BMC, en a d’ailleurs remis une couche après la 1ère étape du Tour du Pays basque à la suite d’une grosse et grave chute à 200 m de la ligne d’arrivée qui a envoyé plusieurs coureurs à l’hôpital de Bilbao, dont son Américain Peter Stetina. « C’est hallucinant de voir ça, a-t-il confié au site cyclingpro.net. Il semble que dans cette dernière ligne droite, des barrières ont été enlevées mais elles cachaient des îlots directionnels non visibles et qui ont provoqué cette chute. Tout ça au bas d’une descente. Les gars étaient à 80 km/h ! Il y a des mecs à l’hôpital ce soir. Ils attendent quoi, ces organisateurs ? Qu’il y ait des morts ? On doit attendre ça pour qu’il y ait une vraie réglementation unique dans toutes les courses et préservant la santé des coureurs ? (...) Ils ne se soucient pas de la santé des mecs, on va au casse-pipe ! On ne pense qu’au spectacle ! Ce que j’ai vu sur place, c’est affreux. Des coureurs vraiment gravement blessés, transportés à l’hôpital. Le mien, Peter Stetina est dans un sale état. Sa jambe a triplé de volume, donc forcément c’est cassé. Il se plaignait aussi du dos, de la tête. Les autres, Rossetto et un Caja Rural étaient inertes. C’est révoltant ! » (1)
Désormais des voix s’élèvent, de plus en plus nombreuses, pour dénoncer ces lacunes et ces défauts d’organisation, notamment dans les épreuves du World Tour censées pourtant être les mieux loties en matière de sécurité. Mais c’est surtout le manque de gouvernance de la part de l’Union cycliste internationale qui apparaît le plus flagrant. Visiblement ses représentants ne savent pas voir ni regarder là où il y a les problèmes. Bref, ils n’anticipent pas assez et les commissaires UCI sont d’ailleurs souvent cités pour leur incompétence ! Il est temps d’arrêter le massacre.
Bertrand Duboux
(1) Aux dernières nouvelles, les plus touchés sont le Français Nicolas Edet (Cofidis), les Espagnols Sergio Pardilla (Caja Rural) et Mikel Landa (Astana) et l’Américain Peter Stetina (BMC) qui souffre d’une fracture de la rotule.
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